La Diaspora Croate

En France

L’immigration Croate dans les pays francophones représente une part très faible de la Diaspora Croate dans le monde. On comptabilise près de 40 000 Croates en France, notamment 5 000 en région Parisienne. Il existe 4 villes: PARIS – LYON – NICE – MULHOUSE où la communauté Croate est représentée sous forme d’associations ou souvent par une mission catholique.
La communauté Croate de Paris se réunit à l’Eglise des Saints-Cyrille et Méthode, 124 rue de Bagnolet à Paris. Les jeunes de la communauté animent et organisent des manifestations tout au long de l’année… Bagnolet Kafé, retransmissions de matchs sur écran géant, réunions religion catholique…

Dans le monde

Près de 4 millions de Croates vivent à l’étranger, presque autant qu’en Croatie. Dans la deuxième moitié du XIXe siècle de nombreux Croates ont émigré sur d’autres continents.

Leurs descendants sont aujourd’hui 1,5 millions aux États-Unis, 200 000 au Canada, 400 000 en Australie, 400 000 en Argentine, 380 000 au Chili. Plus récemment, beaucoup sont partis vers l’Europe occidentale, principalement en Allemagne où ils sont 350 000, en Autriche 50 000, en Italie 50 000, en Suisse 40 000, en France 40 000 et moins de 10 000 en Belgique, Suède et Pays-bas.

Le découpage de l’ancienne Yougoslavie a laissé beaucoup de Croates hors de Croatie : aujourd’hui environ 350 000 en Bosnie-Herzégovine (ils étaient le double en 1991) et quelques dizaines de milliers en Serbie et en Slovénie.

L'émigration Croate (depuis 1830 jusqu'à nos jours)

L’émigration Croate ou la Croatie émigrée est l’appellation qui est utilisée pour désigner la diaspora Croate, c’est à dire cette partie de la population Croate qui pour des raisons économiques ou politiques s’est expatriée de gré ou de force vers un autre pays (l’émigration). L’expression vaut pareillement pour les Croates qui travaillent à l’étranger. Cette appellation de Croatie émigrée exprime métaphoriquement l’existence d’une seconde Croatie hors frontière étant donné son importance numérique.

Les migrations d’individus ou de groupes de Croates avaient été déclenchées par les raids ottomans et elles s’étaient strictement limitées à l’Europe. Leur importance s’était accrue à la fin du 15ème siècle. A partir des années trente du 19ème siècle se produisirent les premières émigrations massives vers le Nouveau monde, ce qui cadrait généralement avec les flux migratoires européens à cette époque. Dans le contexte des migrations européennes s’étaient également produites dès la fin du 18ème siècle des arrivées massives dans certaines régions Croates, notamment dans le Nord du pays. Les immigrés étaient surtout venus des autres pays de la Monarchie. Au début cela avait été des colporteurs, des boutiquiers et des petits artisans mais avec le temps ils finirent par s’enrichir. La conjoncture économique favorable qui régnait en Croatie y favorisa l’installation de Tchèques, de Slovaques, d’Italiens, de Hongrois et d’Allemands pour ne citer que les principaux. Si parmi les trois premiers peuples avaient prédominé les travailleurs industriels et les paysans les plus en avance, les Allemands et les Hongrois s’étaient quant à eux lancés dans l’achat de grandes propriétés foncières. Ainsi, alors que certains étrangers s’étaient installés dans les régions Croates, celles-ci avaient été abandonnées par leurs natifs, en partie parce que les progrès économiques avaient ouvert des horizons aux Croates. Rien que pour la première décennie du 20ème siècle, six pour-cent de la population avaient quitté les parties septentrionales de la Croatie. En Dalmatie, ce processus s’était accentué depuis les années 70 et 80 du dix-neuvième siècle. C’est à partir des années 70 qu’avait commencé la crise des voiliers qui cédèrent progressivement la place aux Paquebots ; une rupture à laquelle les armateurs dalmates n’avaient pas été capables de s’adapter (surtout pour des raisons financières).

L’émigration à partir de la Dalmatie s’explique d’autant mieux que la région est liée à la mer et à la navigation. Preuve en est que dans les premières années du 20ème siècle, sur un total de 25.000 habitants qui vivaient sur l’île de Brac on en comptait plus de 8.000 à avoir choisi d’émigrer (plus de 32%). C’est ainsi que dans certaines parties de la Dalmatie, en particulier sur diverses îles, le nombre d’habitants diminua entre la fin du 19ème siècle et le début du 20ème, mais cette tendance à la chute se fera sentir jusqu’à la fin du 20ème siècle. Cela avait signifié la première grande vague migratoire. Son intensité fera que la Croatie et ses régions deviendront des contrées européennes fortement marquées par l’émigration. Cela vaut surtout pour la Dalmatie, l’Istrie et les îles. La cause principale de l’émigration des Croates avait été de nature économique. La politique ne joua qu’un rôle secondaire mais elle se répercuta sur le retard économique. L’exemple le plus parlant à cet égard est la dénommée « clause du vin » insérée dans le traité commercial entre l’Autriche-Hongrie et l’Italie (1891). Cette clause avait été extrêmement désavantageuse pour les vignerons dalmates parce que les vins bénéficiaient d’un accès à la Monarchie des Habsbourgs contre des droits de douane minimaux, en particulier ceux de Sicile étaient bon marché. Même si la clause ne fut pas renouvelée après que le traité eut expiré en 1901, ces dix années pénibles avaient poussé de nombreux Dalmates à partir à l’étranger. De surcroît, les vignobles avaient été dévastés à deux reprises par le phylloxéra (une maladie de la vigne). La situation était à ce point mauvaise que certaines régions subirent la famine. En une décennie, Vis allait être abandonnée par les trois quarts de ses habitants.

La politique n’influera vraiment sur l’émigration qu’à la fin et immédiatement après la Seconde Guerre mondiale lorsque plusieurs dizaines de milliers de personnes émigrèrent par crainte des représailles. Ce phénomène se reproduira après que les autorités yougoslaves eurent étouffé le mouvement démocratique de l’année 1971. A la fin du 19ème et au début du 20ème siècle, l’émigration Croate vers l’étranger gagna en intensité, avant tout celle en Amérique. En dehors de la maladie de la vigne, l’émigration économique avait été causée par l’effondrement des coopératives familiales, par les politiques étrangères et la lenteur du développement industriel. Par ailleurs, les départs massifs depuis la Croatie furent accélérés par la politique d’émigration qu’avait menée l’Autriche-Hongrie avant que n’éclate la Première Guerre mondiale. En effet, aucune barrière à l’émigration n’avait été instaurée et on pourrait même dire qu’on l’avait encouragée. Cette situation avait coïncidé avec la politique d’immigration libérale de certains pays d’accueil, on songera avant tout aux USA et à certains pays d’Amérique du Sud. Les premières données statistiques fiables font état d’une émigration entre 1901 et 1910, lorsque 157 155 personnes quittèrent la Croatie. Toutes étaient parties en tant qu’Autrichiens ! Au cours de cette période, la structure des émigrants subira de légères transformations. Dans l’ensemble les émigrés étaient des hommes du village, jeunes et sans qualifications professionnelles. Dans les pays d’accueil ils travaillaient généralement dans les plus mauvaises conditions en effectuant des travaux physiques lourds, ceux que la population locale évitait de faire. Hormis des cas individuels plutôt rares, seules les générations nées au sein de l’émigration commencèrent à gravir l’échelle sociale. La première génération des émigrés a contribué au budget familial en envoyant chez elle de l’argent grâce auquel des dettes étaient remboursées ou les conditions de la ferme améliorées.

 

Une bonne partie des émigrants s’était rassemblée dans certains centres mineurs et, dans l’ensemble, elle s’était adonnée à des professions similaires. Aux USA on se rendait surtout dans les aciéries de Pittsburgh ; en Californie (à San Pedro) on s’occupait de la pêche ; dans le Nord du Chili on rassemblait du salpêtre tandis que dans le Sud (par exemple à Punto Arenas) on travaillait dans les chantiers navals. En Nouvelle-Zélande on extrayait de la résine ; les immigrés étaient arrivés jusqu’à Auckland dans le Nord par voie de mer et à partir de là ils s’étaient enfoncés vers l’intérieur à la recherche de résine (en s’égouttant du bois kauri la résine parvenait sous terre pour y reposer pendant des années et se transformer en caoutchouc). Certains de ceux ayant acquis un capital de départ étaient devenus de gros entrepreneurs mais bon nombre firent faillite. Ce qu’on appelle « l’émigration en chaîne » avait causé des concentrations en certains endroits. Des groupes compacts d’émigrés s’étaient formés, ce qui aujourd’hui encore donne quelque cachet à certains milieux. Les groupes étaient souvent liés sur le plan familial, mais aussi par leur lieu d’origine, par la région, etc. C’est ainsi que l’on a pu trouver au Chili de nombreux habitants de Brac, au Pérou des Dubrovnikois, en Argentine des gens de Hvar, au Brésil de Korcula, en Californie de Vis, en Louisiane de Peljescac, en Nouvelle-Zélande des gens de Makarska, en Australie des Dalmates ainsi que d’importants groupes du Medjumurje. A toutes les époques, les émigrés avaient possédé une certaine conscience d’avoir quitté leur patrie à titre temporaire.

La répartition spatiale caractérisée, les professions similaires, l’insouciance du pays d’accueil à l’égard des problèmes spécifiques des émigrés, une tradition d’organisation dans la patrie, tout cela a créé chez les Croates immigrés une relation active envers leur propre patrie ainsi que diverses formes de rassemblements sociaux entre eux. Les toutes premières sociétés d’émigrés à avoir été fondées remontent aux années cinquante du 19ème siècle : à San Francisco en 1857 et à la Nouvelle-Orléans en 1874 alors que dans un processus d’unification sera créée la Communauté fraternelle Croate à Pittsburgh en 1894, laquelle est encore active de nos jours. En Amérique du Sud des sociétés seront fondées à partir de 1874, en premier lieu en Argentine. Les plus nombreuses furent celles de secours mutuel, celles des sapeurs-pompiers, celles de type culturel, sportif et politique. Outre qu’elles avaient aidé à ce que soient résolus des problèmes spécifiques aux émigrés (aides en cas d’accident ou de chômage), les sociétés avaient joué un rôle important afin de préserver la conscience nationale. Dans les périodes cruciales, elles avaient également été à la base des mouvements et des organisations créées dans le but d’offrir à la patrie une aide morale, politique ou matérielle. S’agissant de sauvegarder l’identité nationale, les paroisses catholiques Croates avaient joué un rôle important de même que diverses organisations religieuses ou encore certains prêtres. Le journalisme Croate au sein de l’émigration joua un rôle équivalent. Il était apparu au début des années quatre-vingts du 19ème siècle. Dès l’année 1884 était paru au Etats-Unis (à San Francisco) le premier journal Croate de l’émigration, le « Slavenska sloga ». Les organisations politiques, les divers mouvements ainsi que le journalisme dans l’émigration furent étroitement liés aux partis politiques, aux courants et aux individus dans la patrie et ils participèrent activement à leur existence. C’est en cela que l’histoire de l’émigration fait partie de l’histoire Croate. Dans les moments où dans la patrie s’étaient manifestées différentes options politiques, l’émigration Croate s’était également tâtée mais en sachant toujours soutenir la volonté politique du peuple Croate, en particulier dans la lutte pour l’indépendance Croate.

Les recherches actuelles ne fournissent pas de réponse exacte sur la quantité de Croates qui ont pris la voie de l’émigration pas plus qu’elles ne nous disent combien de Croates vivent actuellement à l’étranger. La vague d’émigration dans les années soixante du 20ème siècle, qui avait principalement été orientée vers les pays européens (Allemagne, Autriche, Suède, Suisse, etc.), était perçue comme un « départ temporaire au travail à l’étranger », mais en fait elle a représenté une lourde perte démographique pour la Croatie (en particulier en ce qui concerne les générations qui sont nées dans ces pays). Si l’on compare plusieurs sources, on en arrive au nombre d’environ 750 000 Croates qui se sont expatriés durant la seconde moitié du 20ème siècle avec pour intention de s’installer définitivement dans l’un des pays d’accueil. Les études sérieuses estiment qu’aujourd’hui vivent plus de 2,5 millions d’émigrés Croates dans les pays d’outre-mer si l’on inclut leurs descendants.

Source : Ivan Jurisic – Nenad Jankovic, Hrvatska od 7 stoljeca do vijeca Europe (La Croatie depuis le 7ème siècle jusqu’au Conseil de l’Europe), Slovo, Zagreb, 2005, p. 111-116.

Plus particulièrement sur l’émigration au Canada.